vendredi 20 septembre 2019

Les duels d'ombrelles

Après la création des duels de thé, les vaporistes, toujours aussi imaginatifs,  ont inventé les duels d’ombrelles. Cette pratique, plutôt féminine, permet à deux Ladies de régler un différent.

Le duel d’ombrelle nécessite une ombrelle pour chacune des participantes et de connaître les trois figures imposées. Voici les règles définies par le Fédération Française de Duels d’Ombrelles.

Les participantes se saluent puis se mettent dos à dos. Le juge leur demande la raison de leur duel. Après l’énoncé de la raison, il leur demande alors si elles sont saines de corps et d’esprit pour participer au duel. Au compte du juge, les duellistes doivent faire trois pas en avant, puis se retourner et faire le plus de figures pendant le compte à rebours du juge ( 5 ..4..3…2…1 stop).

Au mot "stop", les participantes s'immobilisent sur la dernière figure et doivent rester dans cette position le plus joliment possible (le style compte aussi !).

Les figures, au nombre de trois, sont les suivantes :
Planter = ombrelle fermée par terre ;
Pointer = ombrelle ouverte face à l’adversaire ;
Poser = ombrelle ouverte posée sur l’épaule et tournant.

Le planter bat le pointer, le pointer bat le poser et le poser bat le planter. En cas de figure identique, il y a match nul et aucune des participantes ne marque de point.

Le match se joue en trois manches gagnantes. S’il y a contestation, la joueuse peut demander l’avis d’un autre juge (par exemple un juge de thé s’il y en a un).

Magnifique figure du "poser" effectuée par Lady Adélaïde Froufrou sur le stand du Gramophone Beuglant
Comme vous l’aurez deviné, il s’agit du « recyclage » à l’esprit Steampunk du célèbre « pierre-feuille-ciseau » de notre enfance.

vendredi 13 septembre 2019

Le cabinet de curiosités de Gildas Blueford

Lors de ses voyages et expéditions, Gildas Blueford a toujours aimé collecter des objets qui l’intriguent, qui le fascinent et qui pourraient lui servir dans ses recherches. Cependant, sans lieu convenable où les stocker, ils se détérioraient rapidement. Un jour, un ami artiste lui donna une mallette en bois dans laquelle il rangeait son matériel de peinture. Gardant son contenu à l’abri des éléments, cette malle a dès lors suivi Gildas Blueford dans ses aventures autour du globe.
Les échantillons qu’elle renferme lui ont permis de poursuivre ses recherches dans les meilleures conditions même à l’autre bout du monde. Nous vous proposons une visite guidée de  découvert des plus belles pièces de ce cabinet de curiosités portatif.

Ceci est une tête réduite (ou Tsantsa) récupérée auprès d’une tribu Jivaro en Équateur alors qu'il était à la recherche de l'explorateur  Alphonse Marivert, disparu lors de ses recherches entomologiques ; il aurait croisé le chemin de ces indiens coupeurs de têtes. Serait-il possible que cette tête réduite soit celle d'Alphonse Marivert ?


Lors d’un voyage au Népal à la recherche du fameux Yéti, il eut la possibilité d’en observer quelques spécimens de réaliser un moulage d’une empreinte. Celle-ci provient d’un individu juvénile mais sa profondeur suggère qu’il ferait déjà une trentaine de kilos.

Ce rouage était coincé dans le bec d’un calamar géant dont les restes ont été retrouvés dans le ventre d’un cachalot échoué à Cuba. Les dimensions hors normes de ce bec font penser que le calamar serait celui qui a attaqué le Nautilus au large des îles Lucayes, ce qui signifierait que le rouage faisait jadis partie de l’incroyable sous-marin.

Gildas Blueford est particulièrement fier d’être l’un des rares à posséder un œil de Dodo, oiseau disparu à la fin du 17ème siècle. Celui-ci était conservé dans une fiole d’eau de vie depuis près de deux cents ans. Il est intéressant de comparer la vision des différentes espèces du règne animal car elles ne voient pas le monde de la même manière.

Notre aventurier fuit aussi frappé, lors de sa découverte de la région amazonienne, par la variété de ses insectes, notamment ses papillons. Ceux-ci, de couleurs éclatantes, se comptaient par centaines dans chacune des cimes de la canopée. Que la nature peut être belle…

Il a aussi eu la chance de participer à une plongée sous-marine hors du commun. C’était la première fois qu’il voyageait à bord d’un submersible. Il put remonter quelques échantillons pour les étudier en laboratoire, notamment quatre dents de requin. Celles-ci se renouvellent durant toute la vie de l’animal, lui conférant une mâchoire mortelle.

Ce lambeau de peau écailleuse fut retrouvé dans les montagnes du massif scandinave. Après recherche, il pourrait s’agir d’une espèce de dragon. Le fait que d’après ses expériences, les écailles possèdent une dureté de 10 sur l’échelle de Mohs (aussi dure que le diamant) corrobore cette hypothèse. Des recherches plus approfondies seraient néanmoins nécessaires.

Le bézoard est constitué de matières non digérées qui forment une concrétion dans l’estomac. Ils sont réputés pour servir d’antidote contre tous les poisons connus. Celui-ci provient d’une chèvre et ne lui a jamais servi, mais il le garde quand même au cas où…

Cette racine de mandragore fut déterrée en Italie, dans les ruines d’une abbaye. Cette plante, dont le cri peut rendre fou entre dans la composition de nombreuses recettes alchimiques, fut  conservée à l’abri de la lumière. À son air renfrogné, nous en déduisons qu’elle lui en veut de l’avoir soustraite à son habitat naturel.

Cette poupée vaudou faisait partie d’un rite de sorcellerie. N’ayant pu identifier l’individu dont cette poupée est à l’effigie, il est préconisé de la garder éloignée de tout objet contondant, ne sachant pas quelle est l’étendu du champ d’action de cet artefact.

Lors des recherches géologiques de Gildas Blueford en Suède, il entra en possession de cette baguette de bois que les habitants d’un petit village lui affirmèrent être magique. N’ayant obtenu aucun résultat allant dans ce sens, il resta sceptique quant à cette affirmation (cependant, en y repensant, quelques disparitions mystérieuses de clés puis réapparu dans la théière pourraient peut-être alors s’expliquer …)

Même si l’esprit cartésien de notre aventurier l’empêche de croire à la divination, cette boule de cristal lui fut cependant offerte par un ami qui s’était intéressé à cette pratique. S’il en trouve le temps, il n’est pas impossible que les reflets irisés de cette sphère et les propriétés optiques du cristal fassent l’objet d’expériences plus poussées.

Ce cabinet de curiosités personnel recèle encore de nombreuses merveilles, mais ne dissipons pas tout le mystère d’un seul coup, et gardons de quoi nous occuper pour une prochaine visite.

dimanche 8 septembre 2019

L'école d'autrefois

La voix de maman me tire doucement du sommeil. Il fait nuit encore, et bien frais dehors. Je me lève rapidement, fais ma toilette, m’habille et vais dans la salle à manger où maman m’a préparé mon petit-déjeuner. Puis, je rassemble mes affaires : une musette en grosse toile cousue par maman contenant un plumier, une ardoise et un alphabet. Je prends aussi une gamelle contenant le repas de midi que maman m’a préparé et la blouse grise boutonnée qui protège mes vêtements pendant la journée. Enfin, une bûche pour ma participation au chauffage de la salle de classe complète mon fardeau.
L’école communale est à un bon kilomètre de chez moi ; je fais le trajet à pied, accompagné de mon meilleur ami qui habite la ferme la plus proche, et de mes deux cousins que nous récupérons un peu plus loin. A plusieurs, le trajet semble plus court. En cette saison, nous portons une pèlerine à capuche pour nous protéger du froid, et de grosses chaussettes dans des galoches cloutées.

Nous arrivons en avance car il est impensable d’être en retard à l’école ! Lorsque huit heures sonnent, le maître, dont le logement se trouve au-dessus de l’école, ouvre la porte, tape des mains et nous nous mettons en rang. Le maître nous fait entrer dans la salle en ordre et en silence. Lorsqu’il pleut, nous déposons nos galoches mouillées près du poêle pour les faire sécher. C’est aussi autour du poêle que nous nous rassemblons les jours d’hiver pour faire réchauffer notre repas. Chaque enfant dépose près du poêle la bûche qu’il a apportée et qui servira à l’alimenter. D’ailleurs l’allumage et l’entretien du poêle est l’une des premières leçons qu’apprennent les grands garçons.
L’école n’est pas mixte : garçons et filles suivent les cours dans des établissements séparés. Chaque classe peut contenir jusqu’à 40 enfants. Les pupitres comprennent tables et bancs pour deux personnes, le dessus de la table se soulève et dévoile un rangement où l’on peut déposer ses cahiers d’exercices. Sur le dessus, un encrier en porcelaine est rempli d’encre violette par le maître.
Le bureau du maître se trouve un peu en hauteur, sur une estrade, afin de pouvoir surveiller la classe. Derrière lui, un tableau noir où, chaque matin, il écrit une leçon de morale qu’il fait lire à l’un d’entre nous et qu’il explique ensuite. La salle dispose d’une grande armoire où il conserve tout ce qui est utile à son enseignement : les livres, les boîtes contenant les poids et mesures, les instruments de géométrie, les tableaux d’insectes… Au mur on trouve une carte de France, une planche montrant le fonctionnement d’un cœur et une affiche vantant la tempérance vis-à-vis de l’alcool.

Nos journées s’organisent au rythme des leçons d’orthographe, de grammaire, d’arithmétique, d’histoire et de géographie, ainsi que des « leçons de choses ». Tandis que les filles apprennent la couture et le tricot, les garçons font des travaux manuels. Tous, nous devons écrire à la plume et nous entraîner pour avoir une belle écriture. L’un de mes camarades est gaucher, mais il n’a pas le droit d’écrire de la main gauche considérée comme « la main du diable » ! En début d’année, le maître lui a attaché la main gauche pour l’obliger à apprendre à se servir de sa main droite ; il y arrive assez bien maintenant.
La semaine prochaine sera un grand moment pour notre école : sept d’entre nous, après cinq années de scolarité, vont passer leur certificat d’études ; le maître va les accompagner pour, espère-t-il, récolter les honneurs du fruit de son travail. La première épreuve est écrite ; elle se compose d’une dictée, de deux problèmes de calcul et d’une rédaction. Pour ceux qui ont au moins cinq sur dix à cette épreuve vient ensuite l’oral : muni de ses cahiers, l’élève doit réciter un texte, l'expliquer, et répondre à des questions d'histoire et de géographie. Malgré la bienveillance des examinateurs, en 1900, seuls 40 % des candidats décrochent le précieux examen !

Un grand merci au musée du scribe à Saint Christol-Lez-Ales (30) dont les photos de la salle de classe illustrent cet article (http://www.museeduscribe.com/)

Lady Adélaïde Froufrou