vendredi 26 février 2021

Le Prestige

Le Prestige n’est pas à proprement parler un film Steampunk. Vous n’y verrez pas de complexes et improbables machines à rouages (quoique !), mais pour la rédaction du Gramophone Beuglant, il colle parfaitement à l’esprit du genre.

Tout d’abord, Christopher Nolan, le réalisateur, nous immerge dans une magnifique reconstitution de Londres à la fin du XIX° siècle au travers d’une esthétique sombre mariant le passé et le futur, technologie d’époque et futuriste. Il arrive à recréer une atmosphère gothique très steampunk, que ce soit dans les rues de Londres ou lors de l’exposition scientifique au Royal Albert Hall.
L’intrigue décrit la lutte acharnée de deux magiciens incarnés par Hugh Jackman et Christian Bale dans une course obsessionnelle pour réaliser le tour de l’homme transporté. Mais ce n’est pas l’univers de la magie qui intéresse le réalisateur, c’est l’affrontement entre un homme de spectacle et un technicien. Par-delà cette rivalité, c’est l’opposition entre spectacle et science, entre magie et réel. En filigrane, on peut presque deviner l’opposition entre Méliès et les frères Lumière !
La pépite du film, la cerise sur le gâteau, c’est l’apparition de Nikola Tesla, dans son laboratoire de Colorado Spring. Plus qu’un clin d’œil, ce personnage participe pleinement à l’intrigue et par son invention, à l’un des rebondissements de l’histoire. Il est joué par David Bowie, excellent dans ce rôle.
Avec son duel d’acteurs, sa mise en scène esthétique et son script brillant, Nolan signe là un grand film qui devrait ravir les amateurs de Steampunk.
Le Prestige de Christopher Nolan (2006)

vendredi 19 février 2021

Le moteur Stirling

Le 27 septembre 1816, le pasteur et mécanicien Robert Stirling vient déposer un brevet pour une invention qui pourrait révolutionner l’industrie, les transports et bien d’autres domaines. En effet, dans cette époque dominée par les machines à vapeur, celles-ci ont une certaine tendance à exploser, en raison de l’immense pression qui y règne. Pour cela, il faut se passer d’une chaudière et donc alimenter le moteur en énergie (sous forme de chaleur) depuis l’extérieur de l’appareil. Il met donc au point un moteur qui portera son nom : le moteur Stirling.
Le moteur Stirling est un moteur à air chaud : il n’y a pas d’eau ni de vapeur, simplement de l’air qui est chauffé puis refroidit en circulant à travers différents pistons.

Une chambre est d’abord chauffée (à l’aide d’une flamme), l’air se trouvant à l’intérieur se dilate et vient pousser un piston. Lorsque celui-ci est complètement déplacé, l’air peut alors s’engouffrer dans une seconde chambre plus froide et vient faire pression sur un second piston. Mais les deux pistons sont liés et cette action vient repousser le piston de la chambre chaude, évacuant tout l’air restant dans la chambre froide. À ce moment, l’air se refroidit, se contracte et déplace le piston froid en sens inverse ce qui a comme effet de déplacer l’air vers la chambre chaude et le cycle recommence.
Les mouvements de va-et-vient des pistons entraînent une roue qui peut alors servir à activer une machine.

Bien que ce moteur soit plus sûr, moins bruyant et possède un meilleur rendement, il n’est pas aussi puissant que les machines à vapeur qui lui sont contemporaines, ce qui scellera son destin et il ne sera alors presque pas utilisé dans l’industrie. Bien que ce moteur sera par la suite amélioré, il ne connaîtra jamais le succès envisagé par Robert Stirling et son frère, qui travailla aussi sur ce projet.

À la fin du 19e siècle, Gustav Schmidt étudiera le fonctionnement de ce type de moteurs et arrivera à le mettre en équation. Cela s’appellera dès lors le cycle thermodynamique de Stirling

Le Gramophone Beuglant a pu se procurer un prototype de ce moteur révolutionnaire et vous en propose une démonstration.
Des essais pour faire tourner les presses à imprimer du Gramophone à l’aide d’un moteur Stirling sont toujours en cours.

Affaire à suivre...
 
Gildas Blueford

jeudi 11 février 2021

Paris au XIX° siècle et en relief

En près de 112 photographies stéréoscopiques et 48 détails, Giovanni Fanelli et Barbara Mazza nous font découvrir Paris à la fin du XIX° siècle au travers de ses rues, de ses boulevards mais aussi de ses places, de ses gares, de ses marchés, etc. tels que les photographes de l'époque l'ont immortalisée.
Plus qu’une simple collection de photographies, une explication technique ou sociale vient soutenir chacun de ces clichés, témoignages du XIX° siècle, pour nous aider à mieux comprendre la vie de Paris et des parisiens de cette époque. Dommage que les explications soient regroupées à la fin de chaque chapitre et n'aient pas été insérées directement sous chacun des clichés.
Un chapitre est aussi consacré à l’apparition des vues stéréoscopiques à partir de l’exposition universelle de 1851 au Crystal Palace de Londres et à l’engouement qu’elles susciteront lors de la première exposition universelle de Paris en 1859.
Afin de vous permettre de profiter de ce précieux héritage en relief, une paire de lunettes est fournie avec le livre. Cependant celle-ci ne permet que difficilement de voir les images en relief. Un stéréoscope en carton aurait été préférable.
Un ouvrage à posséder pour tout amoureux de Paris à l’époque victorienne pour le témoignage qu'il nous apporte sur cette époque et qui pourra aussi éventuellement être une source d’inspiration pour la création de costumes.
Paris animé, Paris instantané: Photographies stéréoscopiques 1850-1900
Livre de Giovanni Fanelli et Barbara Mazza

jeudi 4 février 2021

Un manuscrit du 10 août 1856 découvert en 2021 !

Un texte manuscrit du 10 août 1856 vient d’être découvert lors de travaux réalisés dans un mur de la chapelle Sainte-Croix-de-Jérusalem à Dijon.

Un papier plié en six a été découvert fin janvier 2021 par des maçons qui travaillaient à la restauration de la chapelle Sainte-Croix-de-Jérusalem à Dijon. Sentant une pierre bouger, ils l’ont extraite du mur et ont trouvé derrière un papier plié en six et déposé volontairement à cet endroit par un précédent maçon… du 10 août 1856 !

Cette lettre a été rédigée par Nicolas Godard, maçon ayant travaillé dans la chapelle en 1856 lors de travaux de maçonnerie, de charpente, de plâtrerie, de serrurerie et de ferblanterie qui y furent menés dans les années 1855-1858.

Il y raconte qu’avant d’être maçon, à l’âge de 18 ans, il a participé à la guerre de Crimée qui a opposé de 1853 à 1856 l’empire Russe à une coalition formée de l’empire Ottoman, de la France, du Royaume Uni et du royaume de Sardaigne. Il a été marin sur « L’Orénoque », une frégate à vapeur.

Il explique aussi qu’à cette époque règne une grande misère dans la ville de Dijon. En cause, peut-être, les pluies torrentielles qui s’abattent sur une partie de la France et provoquent des crues dans la vallée du Rhône.

Ce type de document laissé par des artisans n’est pas rare, mais la grande majorité d’entre eux ne sont jamais découverts ou se détruisent au cours du temps à cause de l’humidité. Ce témoignage rare nous replonge en quelques lignes directement dans la France de Napoléon III.

Il est intéressant de noter que cette lettre rédigée par un artisan l’est dans un excellent français et que son auteur cite même un vers de Racine. Cela donne une idée de l’instruction de son auteur.


Cette lettre sera déposée aux archives municipales de la ville de Dijon.

Au recto
"En cette chapelle étant en réparation a travaillé le sieur Godard marin [congédié ?] de la frégate à vapeur l'Orénoque après avoir fait la campagne de Crimée à l'âge de 18 ans, natif de Moloy canton d'Is sur Tille Côte d'or
Celui qui met des freins à la fureur des flots sait aussi des méchants arrêter les complots
Noms des ouvriers plâtriers : Guillemain Chaser Nicolas Villemain Godard Nicolas
année 1856"
 
Au verso
"10 août
Boutique de Monsieur Lambert plâtrier cour du cheval blanc rue Saint Nicolas
Au moment où ces lettres sont écrites la plus grande misère existe à Dijon"
 
Nicolas Antoine Godard, fils d'Antoine Godard cordonnier et de Marie Boyer, est né le 14 février 1838 à Moloy en Côte d'Or. Son témoignage évoque son passage sur le trois mâts « L'Orénoque ». Ce navire à propulsion mixte (voiles et vapeur) fut mis à la mer en 1843 et devint l'un des navires de la flotte française au cours de la guerre de Crimée, mobilisé notamment au cours du siège de Sébastopol. Il fut sorti de la flotte de l'armée française en 1878 pour être transformé en baleinier.
Comme une devise, Nicolas Godard complète sa biographie sommaire par une citation tirée de l'Athalie de Racine : "Celui qui met des freins à la fureur des flots sait aussi des méchants arrêter les complots". Cette mention se rapporte-t-elle à l'Orénoque ou à un épisode de la vie de Nicolas Godard ? Les interprétations à l'heure actuelle restent ouvertes.
 
Dans son texte, l'ouvrier fait référence à la boutique de monsieur Lambert, plâtrier, cour du cheval blanc. Située 36 rue Saint-Nicolas (actuelle rue Jean-Jacques Rousseau), cet îlot d'habitation abrite alors des ouvriers et des artisans - relieurs, doreurs, serruriers, couvreurs, tailleurs de pierre, menuisiers...- parmi lesquels la famille Lambert.
 
Enfin le document nous interpelle par la mention finale écrite par l'ouvrier-plâtrier. Pour témoigner du quotidien de ses semblables, il conclut son texte en indiquant « Au moment où ces lettres sont écrites la plus grande misère existe à Dijon ». Mention troublante qui fait resurgir la vie, souvent difficile, des plus humbles, plus de 165 ans après avoir été écrite.