vendredi 28 août 2020

La boîte à cartes

Tout explorateur digne de ce nom se doit de transporter avec lui les cartes nécessaires à son voyage.

Afin de protéger les siennes lorsqu’il est en expédition, Gustave Boileau a fait réaliser le modèle ci-dessous.
Il est en bois rigide afin de protéger efficacement les précieuses cartes. Ce matériau lui permet aussi de flotter en cas de chute accidentelle dans l’eau. Le couvercle renferme une boussole amovible permettant de se repérer.
Une poignée en cuir complète l’objet en facilitant son transport.
Voici donc un objet dont Gustave Boileau ne se sépare jamais.

vendredi 21 août 2020

Le jour où la machine s’arrêta - Chapitre VIII : Vers un nouveau monde

Nous arrivons bientôt au terme de l'aventure vécue par Georges Brétavia. Vous avez désormais son destin entre vos mains, et vous seul(e) pouvez choisir son avenir.

Si vous pensez qu'il va trouver le moyen de s'échapper du monde dans lequel il a a été projeté cliquez sur la main ci-dessous.

 Si vous pensez qu'il est condamné à vivre dans ce nouveau monde, cliquez sur la main ci-dessous.



vendredi 14 août 2020

Le jour où la machine s’arrêta - Chapitre VII : Le basculement

Pour vous accompagner durant tout l'été, le Gramophone Beuglant vous propose de lire une nouvelle de Gustave Boileau : "Le jour où la machine s'arrêta". Bonne lecture et à la semaine prochaine pour la suite !






Chapitre VII : Le basculement

Après cette découverte, il décide de revenir sur ses pas et de rentrer à son domicile. En passant devant le parvis de la gare, il ne peut s’empêcher de regarder la pendule qui indique toujours quinze heures vingt-huit. Mais soudain son regard est attiré par un détail troublant. Lorsqu’il était venu la précédente fois sur le parvis, il se souvient que  des enfants jouaient au cerceau. Ils sont toujours là, tout aussi immobiles. Mais alors que le cerceau était à l’époque en train de chuter, il constate qu’il a bougé et qu’il touche presque le sol.

Une idée folle lui traverse alors l’esprit : il vit dans un monde qui bouge très lentement ! Son esprit cartésien ne fait qu’un tour. Il sort un crayon de son cartable et fait des marques sur tous les objets qui peuvent  être en mouvement : le pied d’un passant qui semble pressé, la roue du vélo d’un cycliste, les pattes d’un chien, la hauteur de la boisson que l’on est en train de servir dans un verre au buffet de la gare, etc.

Chacune de ces marques est soigneusement reportée dans un carnet. Si tout ou partie des objets marqués évoluent, ce sera la démonstration que le monde bouge, mais à une vitesse différente de lui.

Au bout de quelques jours de son temps à lui, passés à surveiller ses expériences, il constate ce qu’il pressentait ou craignait : les objets ont bougé ! Le rayon de la roue de vélo qui était horizontal ne l’est plus, la chaussure du passant pressé s’est légèrement soulevée et le niveau de la boisson dans le verre servi au buffet de la gare a monté. Il est donc seul au milieu d’un monde qui tourne infiniment plus lentement que lui.

Il est à la fois excité d’avoir élucidé un des mystères du monde dans lequel il se trouve, mais désespéré de ne pas savoir comment s’en extraire.

Il a en effet mis à profit les nombreux jours passés à surveiller le déplacement des objets pour tenter, mais en vain, de trouver la manière de s’échapper de cet univers. Il a bien imaginé suivre le même procédé que celui qui l’a conduit dans cette situation. Mais il fait un temps magnifique, et il sera vraisemblablement mort de vieillesse avant que la météo ne change dans ce monde au ralenti et qu’un nouvel orage et un éclair ne s’abattent  à nouveau sur lui pour le ramener dans son monde.
 
Il pense alors à écrire une lettre décrivant ce qui lui arrive et à la mettre en évidence devant le regard d’un éminent scientifique travaillant sur le temps. Mais le temps qu’il la lise – dans l’hypothèse où il ne la prendrait pas pour un canular – et qu’il entame d’hypothétiques recherches pour venir à son secours, il sera décédé depuis fort longtemps. Pour les mêmes conditions de délais, il n’est pas non plus envisageable d’entamer une conversation par lettre interposée. C’est un peu comme communiquer à l’aide de bouteilles jetées à la mer.

Il ne voit donc aucune issue possible sauf à rester coincé dans ce monde parallèle jusqu’à la fin de ces jours. Il se sent comme un éphémère dont la vie ne dure qu’une journée, sa vie risquant fort de ne durer qu’une journée du monde au ralenti.

Il regagne le salon, ferme les volets, tire les épais rideaux, s’allonge sur la méridienne et tente de se reposer. Bien qu’enfermé dans le salon, volets fermés et rideaux tirés – il fait en permanence jour comme l’été dans le cercle arctique – il a beaucoup de mal à dormir, ne cessant de se remémorer les derniers évènements qu’il vient de vivre.

Lui qui avait toujours eu une haute opinion de son travail vient de découvrir qu’il n’est pas en pointe dans son domaine et que certains de ses confrères sont beaucoup plus avancés que lui en matière d’amélioration de l’homme et d’automate.

Lui qui chérit tant son épouse et son fils, qu’il n’hésite pas à comparer – déformation professionnelle oblige – à deux jambes, ses deux amours lui permettant d’avancer dans la vie, vient d’être soudainement amputé !

Bien qu’entouré du monde qu’il connait et dont il est l’un des éléments, il est désormais seul, sans possibilité de communiquer avec autrui. Il est abattu et désespéré.

A cours d’idées pour échapper au monde figé qui l’entoure, il ne souhaite plus lutter et envisage désormais d’en finir. Mais là encore, toutes les solutions classiques auxquelles il pense ne fonctionnent pas dans ce monde.

Impossible de se suicider par arme à feu. Le projectile mettrait trop de temps à traverser son corps. Considérant la consistance de l’eau, il n’est pas sûr que la noyade soit un moyen plus efficace. Il pourrait s’allonger sur les rails devant les essieux d’un train. Mais vu la vitesse du train il devrait attendre de longues heures dans d’atroces souffrances pour que les roues du train lui passent sur la totalité du corps. Reste la chute depuis un point haut, mais s’il ne meurt pas sur le coup, il risque de souffrir et il est assez douillet.



vendredi 7 août 2020

Le jour où la machine s’arrêta - Chapitre VI : La découverte

Pour vous accompagner durant tout l'été, le Gramophone Beuglant vous propose de lire une nouvelle de Gustave Boileau : "Le jour où la machine s'arrêta". Bonne lecture et à la semaine prochaine pour la suite !






Chapitre VI : La découverte

Lorsqu’il dormait, il a fait un rêve. Il s'est revu, petit garçon, parcourir les allées d'une boutique de jouets. Il se rappelle que son rêve d'alors était de se faire enfermer dans un grand magasin et de passer la nuit dans le rayon des jouets afin de pouvoir jouer avec tous ceux présents. Il se dit alors que la situation n'est, en fait, guère différente. Il est seul dans un monde où personne ne l'observe, personne ne le surveille et où il peut absolument tout faire sous réserve bien sûr que les éléments le laissent faire...

Il essaye de se souvenir de tout ce qu'il a toujours voulu faire et qu'il n'a jamais pu faire par manque d'argent, par manque d'audace ou bien parce que la morale le réprouvait.

De nombreuses idées lui traversent l’esprit. Il se dit que s’il a pu ainsi pénétrer chez lui et voir sa femme en train de se vêtir, il peut de la même manière pénétrer chez ses semblables pour les espionner et ainsi percer leurs petits secrets. Que se passe-t-il derrière les volets toujours clos de la maison du bout de la rue ? A quel stade en sont les expérimentations de l’un de ses confrères, l’intrigant professeur Manivet sur l’amélioration de l’être humain ? L’idée de pénétrer en toute impunité l’intimité de ses contemporains lui redonne du baume au cœur et lui procure même une certaine excitation.

Il est fatiguée de sa journée et il décide de rentrer de rentrer à son domicile pour manger et se reposer. Quitte à prendre du repos, autant que cela soit chez moi se dit-il !

A son réveil, il se décide à rendre une petite visite à son confrère le professeur Manivet. Après avoir recherché son adresse dans une publication sur ses supposées avancées en matière d’automates humains, il se met en route. Son laboratoire d’étude n’est pas à côté et il lui faut ce qu’il imagine être plusieurs heures pour arriver sur place.

Sur le boulevard, l’immeuble abritant le laboratoire est de style Haussmannien. Après avoir vérifié la présence de la plaque en cuivre indiquant « Professeur Manivet» il  tente d’ouvrir la porte principale. Par chance elle est ouverte. Il s’en félicite car les fenêtres sur rue sont à une hauteur importante et il ne se sentait pas capable de gravir à la façade à mains nues. Elle ouvre sur un passage pour les calèches. A gauche se trouvent quelques marches aboutissant à une porte vitrée, elle aussi ouverte. C’est mon jour de chance, se dit-il. Il pénètre dans le bâtiment à la recherche de la pièce ou des locaux dans lesquels le professeur Manivet mène ses expériences.

Après avoir déambulé dans l’immeuble, parcouru les étages et ouvert de nombreuses portes donnant sur des bureaux ou des bibliothèques, pas de trace d’un laboratoire et encore moins du professeur Manivet. Il commence à envisager le fait que ce n’est pas à cette adresse qu’il trouvera ce qu’il est venu chercher. Dépité, il ressort sous le porche et, avant de quitter les lieux, décide de faire quelques pas dans le jardin. Au fond du jardin, un modeste bâtiment en rez-de-chaussée à mi-chemin entre le bûcher et la serre lui redonne espoir. Il hâte son pas. A travers les vitres, il distingue de nombreux assemblages de tiges métalliques, rouages, ressorts, clés, etc. Il a trouvé l’atelier où le professeur Manivet doit fabriquer ses drôles de machines.

Il se souvient alors avoir été impressionné, quelques années auparavant, par une attraction du cirque Barnum lors de sa tournée en Europe. Il s’agissait de la tête mécanique de Joseph Faber. En reproduisant le plan des organes humains du discours, les différentes parties étant assurées par des cordes et des leviers au lieu des tendons et des muscles, Joseph Faber avait réussi à recréer une tête parlante.

Il se murmurait dans le petit monde des scientifiques que le professeur Manivet était sur le point d’achever, non pas une tête ou une partie du corps, mais un automate humain complet, capable d’obéir à l’homme.

N’y tenant plus, Georges Brétavia brise une des vitres du local et pénétre à l’intérieur. Il y trouve un arsenal de diverses machines à l’apparence sophistiquée. Il reconnait au passage quelques automates de la maison Roullet-Descamps. A diverses échelles, certains ont une apparence humaine, mais point d’automate humain grandeur nature. On prêtait peut-être trop au professeur Manivet ou bien ses recherches n’étaient-elles pas si avancées qu’il se murmurait en ville. Au fond de la pièce, un petit bureau supporte divers ouvrages et de nombreux plans.

Au mur est épinglée une photo d’un homme assis dans une voiture hippomobile tirée par un homme en costume blanc. Une légende figurait en dessous : M. Louis Philip Perew et l’homme-traine-voiture. Il prend la photo, roule la pile de plans posés sur le bureau qu’il met aussi dans son cartable. Après avoir parcouru une dernière fois l’atelier, il prend le chemin du retour. Il est un peu déçu. Il s’attendait à trouver un laboratoire semblable à celui du roman « Frankenstein ou le Prométhée moderne » qu’il avait tant aimé, et il quitte l’atelier d’un horloger.
Traversant le jardin en sens inverse, les images de l’atelier repassent dans sa tête lorsqu’une le fait s’arrêter net. Au fond de l’atelier il y a un palan métallique fixé au plafond. A quoi peut servir ce palan dans un atelier de mécanique de précision ? Il fait demi-tour, entre dans l’atelier par la vitre cassée et se rend sous le palan. Le sol est jonché de caisses vides. Il les déplace rapidement et met ainsi en évidence une trappe de grande dimension dans le sol. A l’aide de l’anneau métallique fixée à celle-ci il la soulève prestement malgré son poids. Une échelle de meunier permet d’accéder au sous-sol. Fort heureusement, celui-ci est éclairé. De dos il voit un homme en redingote penché sur une table de travail. Il en fait le tour et reconnait le professeur Manivet. A cet instant, sa vue s’arrête net sur la construction qui se trouve devant lui. Un automate à forme humaine d’au moins deux mètres de haut est enchâssé dans une structure en bois le supportant.

Les rumeurs ne mentaient pas. Le professeur Manivet assemble un automate humain à taille réelle ! Pour le moment il ne ressemble pas encore réellement à un être humain et n’est qu’un assemblage de rouages, de bielles et de ressorts. Mais en l’habillant et en lui faisant porter un masque sur le visage, l’illusion pourrait fonctionner. Le moindre centimètre carré du volume intérieur de l’automate est occupé par de complexes mécanismes. Il ne s’agit donc pas d’un automate habité par un conducteur qui en piloterait les gestes mais d’une machine autonome. Elle est d’ailleurs raccordée à plusieurs piles à colonne Volta, elles-mêmes reliées à des bouteilles de Leyde et divers autres appareils électriques inconnus de lui.

Mille questions assaillent son esprit : l’automate est-il réellement autonome comme il se plait à l’imaginer ? Comment le contrôle-t-on ? Quelles sont les intentions du professeur Manivet en  le fabriquant ? Comment l’automate appréhende-t-il son environnement ? Grâce au nouveau procédé de capture des images en mouvement des Frères Lumières ? Autant de questions auxquelles il n’a malheureusement pas de réponse ! Cette découverte lui fait prendre conscience de la petitesse de ses propres réalisations, même si sa main mécanique qui a eu un petit succès à la dernière exposition universelle lui procure une certaine fierté. Mais il n’en est pas encore à envisager la construction d’un automate humain. C’est peut-être ce manque d’ambition qui avait poussé le professeur Manivet à refuser l’offre de collaboration à ses recherches de Georges Brétavia.

La découverte qu’il vient de faire le fascine autant qu’elle lui procure une certaine amertume.