jeudi 26 mars 2020

L’histoire des grands magasins

L’histoire des grands magasins débute en France au milieu du XIX° siècle. Jusqu'à la fin du XVIII° siècle, les articles de mode, les parfums, la quincaillerie et tous autres objets du quotidien sont vendus dans de petites boutiques dignes héritières des échoppes médiévales. Car à l’époque, chaque corporation n’a le droit de vendre que les produits qu’elle fabrique à l’exception des merceries. Les boutiques sont exiguës, le marchandage est de mise et le prix est fixé à la tête du client.

En 1791, l’abolition de l’interdiction faite aux commerçants de ne vendre que leur production va donner le coup d’envoi à l’essor du commerce. En cette fin de XVIII° siècle vont apparaitre les « magasins de nouveautés » spécialisés dans l’habillement de la femme. La révolution du commerce est en marche. Ils vont être les premiers à commencer à vendre à petit prix ou à proposer des catalogues de vente par correspondance. Le choix des nouveautés s’élargit, tout y est plus beau et meilleur marché qu’ailleurs. Les classes aisées y côtoient les classes moyennes.
Mais ce n’est qu’au milieu du XIX° siècle, que, profitant de l’émergence de la classe industrielle, du développement des gares et des moyens de transport, des commerçants comme Aristide Boucicaut, Xavier Ruel, Jacque Jaluzot, Ernest Cognac ou encore Alphone Kahn et Théophile Bader vont créer respectivement Le Bon Marché, Le Bazar de l’Hôtel de Ville, le Printemps, La Samaritaine et les Galeries Lafayette.
Les travaux d’urbanisme entrepris par le baron Hausmann vont être un atout précieux pour leur création en leur offrant les grands boulevards parisiens ou des larges avenues comme la rue de Rivoli pour implanter leurs façades.
Sous un même toit, le Bon Marché vend en 1890 près de 200 types d’articles différents allant de la robe au parfum en passant par le linge de maison. Les magasins sont spacieux, lumineux avec un éclairage zénithal la journée et l’électricité lorsque la nuit tombe, et richement décorés. Le grand magasin est pour les femmes de l’époque une fête des sens et un univers de tentations auxquels elles peuvent désormais succomber. Car ces « cathédrales de la consommation » cherchent volontairement à séduire une clientèle féminine en faisant, par exemple, tenir les stands (les rayons) par des employées femmes. Le Bon Marché possède un spectaculaire escalier permettant de desservir les étages. Il est conçu comme un décor d’opéra où les clientes peuvent déambuler mais aussi parader et se montrer. Le Printemps est l’un des premiers magasins à posséder dès 1872 deux ascenseurs. L’objectif est aussi de fidéliser la clientèle. Pour cela il faut rechercher sans cesse de nouveaux produits.
L'escalier du Bon Marché en 1875
Afin de retenir les clientes le plus longtemps possible, le magasin Dufayel va même jusqu’à créer une salle de cinéma qui sera, en ce début de XX° siècle, la salle de cinéma de Paris la plus fréquentée ! Les Galeries Lafayette créeront un salon de thé puis un salon de coiffure et enfin une bibliothèque. Rien n’est trop beau pour émerveiller et retenir la cliente !
L'éclairage électrique du Printemps
Le grand magasin est basé sur le principe de la vente de masse à petit prix, ce qui rend les marchandises désormais accessibles aux classes aisées mais aussi aux modestes bourgeoises et même aux classes ouvrières. Cette évolution est rendue possible par la croissance de l’industrie - notamment la mécanisation de l’industrie textile -, des réseaux de transports mais aussi par de nouvelles pratiques commerciales. On assiste à la naissance de la publicité, les soldes ou des services tels que la livraison à domicile, l’envoi franco de port ou l’échange.
Même si le salaire des employés est relativement faible, Aristide Boucicaut, le patron du Bon Marché, leur verse un intéressement et les incite fortement à progresser dans la hiérarchie de l’entreprise. Il crée également une caisse de prévoyance alimentée par une part des bénéfices mais aussi une caisse de retraite dont on peut bénéficier après 20 ans de travail dans l'entreprise, une cantine gratuite ainsi qu’un service de soins. Cette philanthropie et ce mécénat seront la norme dans les autres grands magasins.
Le Bon marché
Même l’épicerie, avec la création du magasin Felix Potin, va profiter de cette dynamique en appliquant aux produits alimentaires les méthodes commerciales des grands magasins.
Voiture de livraison Félix Potin 1901
Un spectateur privilégié de ce développement note, observe et enregistre les moindres détails de ce nouveau monde. Il établira pas moins de 400 fiches manuscrites sur tous les aspects dont il souhaite parler dans son prochain livre qui s’intitulera tout simplement « Au bonheur des dames ». Il s’agit bien entendu d’Émile Zola !

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